Bien vivre en ville demain
Après la seconde guerre mondiale dans un contexte de croissance économique et démographique élevées, les villes ont été reconstruites dans une logique de séparation des fonctions : travail, habitat, loisir… Cette ségrégation des espaces, correspondait alors à un mode de vie axé sur la mobilité motorisée individuelle. Par la suite, face à une densité grandissante et au manque d’attrait des grands ensembles, les périphéries urbaines se sont intensifiées avec le développement massif de zones pavillonnaires, à proximité des villes mais le plus souvent dénuées d’espaces publics.
Aujourd’hui, notre société s’est complexifiée et doit faire face à de nouveaux enjeux démographiques, sociétaux, économiques, environnementaux, énergétiques… Concrètement, la prise de conscience de la rareté des ressources, le passage d’une société de 3 à 4 générations, la pénurie de logements en zones tendues urbaines ainsi que la saturation des réseaux routiers et des transports en communs nous obligent à repenser la vie dans la cité autrement.
Dans ce contexte, on ne peut en effet plus concevoir l’habitat comme un produit, mais plutôt comme un processus évolutif en phase avec l’accélération du changement. La ville est aujourd’hui autant façonnée par son patrimoine immobilier et ses infrastructures que par les usages de ses habitants, ces derniers devant être placés au centre du processus de la co-conception. A l’heure des réseaux virtuels et des nouvelles mobilités, la ville doit être pensée en termes de parcours, d’expérience, dans l’idée de réconcilier à nouveau, dans des espaces proches voire identiques, travail, habitat et loisir.
Afin de pouvoir répondre le plus efficacement et le plus durablement à ces enjeux du XXIe siècle, la ville doit se réinventer en travaillant sur plusieurs axes qui sont aujourd’hui au cœur des préoccupations des collectivités et des groupes immobiliers :
- Élaborer une ville durable et belle ;
- Construire une ville intelligente et intense ;
- Réapprendre à vivre ensemble.
Elaborer une ville durable et belle
Une ville durable, c’est une ville avec des bâtiments et des infrastructures construits dans une dynamique d’éco-conception : réduction des émissions de gaz à effet de serre depuis la conception jusqu’à la démolition, utilisation de matériaux recyclables, rénovation énergétique du patrimoine immobilier plus ancien, gestion économe de l’eau, intégration de la nature en ville… autant de solutions que nous mettons en œuvre pour limiter l’impact de nos activités sur l’environnement et proposer une qualité résidentielle augmentée. Nous devons également être capables d’offrir un nouveau cycle de vie aux bâtis les plus remarquables, en restructurant des locaux anciens et en les affectant à de nouveaux usages.
Une ville durable, c’est aussi une ville qui a pour souci de préserver la biodiversité et d’amener la nature partout. Dans ce domaine les possibilités sont nombreuses: toits végétalisés, corridors biologiques, jardins suspendus… Il est aujourd’hui possible de développer de véritables coins de nature dans des conditions urbaines extrêmes, permettant ainsi de préserver de la fraîcheur en ville ou d’absorber le CO2.
Enfin, une ville durable, c’est aussi une ville qui se doit d’être belle, harmonieuse, tout en respectant l’ensemble des éléments du cahier des charges évoqué précédemment. Le philosophe Gaspard Koenig a dit récemment qu’il fallait « promouvoir la beauté dans l’habitat », reconnaissant que « l’esthétique a été la grande oubliée de notre modernité ». Mais la beauté d’une ville est aussi un facteur important de bien-être. La verticalité, l’intensité et la densité ne sont aujourd’hui plus des freins à cette recherche du beau, en témoignent les constructions telles que le village vertical Emblématik à Aubervilliers, imaginé par l’architecte Roland Castro. Dans cette tour qui n’en est pas vraiment une, puisqu’il est quasiment impossible de compter le nombre exact d’étages, les jardins sont suspendus mais surtout partagés.
Construire une ville intelligente et intense
La ville intelligente - ou Smart City, est une ville hyper-connectée et ce dans le but d’améliorer le quotidien de ses usagers. Un exemple d’application est celui des parkings partagés. Il s’agit d’un réseau de places de parking accessibles partout en ville : celles des particuliers, plutôt libres en journée, et celles des entreprises ou des administrations, souvent libres le soir. Grâce à une application dédiée, l’automobiliste peut, sur son smartphone, identifier et réserver sa place de stationnement.
En France, on compte aujourd’hui 25 « villes intelligentes » qui bénéficient de services tels que la collecte intelligente des déchets, la mobilité intelligente, des éclairages publics intelligents, des services d’e-administration, des plateformes participatives, du mobilier urbain communicant… Ces initiatives, vouées à faciliter la vie des administrés permettent aussi de les responsabiliser et de les aider à s’inscrire dans une logique de développement durable : économies d’énergies, réduction des émissions de C02, mutualisation d’infrastructures…
Réapprendre à vivre ensemble
Aujourd’hui, face aux défis majeurs du XXIe siècle qui sont essentiellement démographiques et environnementaux, la ville se repense dans une dynamique de proximité, de partage et de citoyenneté, tirant partie des nouveaux usages et services numériques permettant d’accélérer ce changement. En rupture avec les mobilités d’hier, les espaces se réinventent, se partagent ou deviennent modulaires. On voit apparaître au cœur des résidences, des espaces de coworking, des jardins potagers partagés, des salles de sport, des chambres d’amis mutualisées qui permettent de répondre aux besoins des familles recomposées ou à géométrie variable. Les jeunes actifs s’occupent des aînés dans les résidences intergénérationnelles, les aînés transmettent leur savoir ou leur expérience, les lieux de vie deviennent participatifs.
En redonnant la priorité aux circuits courts, en banalisant le télétravail, en valorisant l’entraide au cœur de la cité, tout en veillant à maintenir une harmonie entre espaces privatifs et espaces collectifs, la ville de demain deviendra une ville résiliente et durable, plaçant l’humain et sa qualité de vie au coeur de ses préoccupations. La mixité des populations comme des espaces est le meilleur moyen de lutter contre l’exclusion. Tissé comme une toile de talents et de valeurs humaines, la ville de demain sera organisée en réseau alliant la vitesse du virtuel à la noblesse de la solidarité. Le tout dans un paysage urbain qui aura retrouvé ses couleurs et ne sera plus conditionné par la circulation automobile mais privilégiant d’autres modes de transport, électriques, collectifs ou aériens.
Une utopie diront certains ? Pourtant c’est bien ce vers quoi les collectivités, les aménageurs, les promoteurs mais aussi bien entendu les utilisateurs tendent jour après jour.
Crédits photos : © Vincent Bourdon
Responsable technique de ART BTP SARL chez ART BTP (tout corps d’etat)
6 ansBon continuation Cyril
Vers de nouveaux horizons
6 ansBel article lucide et concis dans l'air du temps des villes souhaitables d'une modernité tardive critique vis à vis d'elle même;
Président chez Akovas Groupe | Maîtrise d’œuvre & + encore
6 ansCe projet me parle ..