Utopia 56 a republié ceci
Le bulletin scolaire de mon petit frère, arrivé en France il y a deux ans comme mineur non accompagné (MNA). « Ensemble excellent de votre part, votre arrivée en cours de formation s’avère très bonne. Travail de qualité et de rigueur. Félicitations. » Avant d’en arriver là, il a grandi seul, dans les rues de Douala, au Cameroun. Et puis un jour, avec deux amis plus âgés, ils sont partis. Il est le seul à avoir survécu jusqu’ici. En arrivant à Paris, le département a d’abord refusé de reconnaître sa minorité, l’abandonnant à la rue, comme des milliers de jeunes chaque année. Par chance, ma mère était là, et lui a ouvert la porte. Un an plus tard, le juge des enfants finira par reconnaître son âge, et si le département fera appel de la décision, sa minorité sera une nouvelle fois confirmée. Aujourd’hui, il a un toit, il va à l’école et après avoir appelé des dizaines d’entreprises, il a finalement trouvé un travail en alternance. Hier, je lui ai demandé : « Maintenant, qu’est-ce que tu aimerais améliorer dans ta vie ? », il m’a répondu : « Tu sais, je suis simple, je ne demande pas grand-chose. » Son histoire lui appartient, mais elle ressemble de près à celle de beaucoup d’autres. Et si ma mère n’avait pas été là, il serait très certainement sous une tente, dans la rue, avec celles et ceux expulsés violemment du théâtre de la Gaîté Lyrique. En France, comme le souligne le rapport parlementaire publié cette semaine, l’aide sociale à l’enfance est profondément défaillante, victime d’un pouvoir politique qui préfère réprimer et stigmatiser, au détriment des enfants et de l’ensemble de la société. Aujourd’hui, en dépit des obstacles administratifs, porté par son courage, une main tendue et un réseau solidaire, il tient debout et continue d’avancer.